Paumé en plein brouillard, Jude ne sentit pas qu'on s'approchait de lui. Il fut donc surpris de voir quelqu'un s'assoir à ses côtés.
April.
Doucement, elle parla. Ces paroles n'étaient pas parfaites. Elles n'avaient pas pour but de convaincre ni de lui laver le cerveau... mais ce n'était pas non plus des paroles vides.

-... Je n'aurais pas non plus la prétention de dire que je connais Jake. Mais il est clair qu'il souffre. Et les gens qui souffrent disent parfois des choses insensées sous le coup de la colère. Des choses qu'au fond d'eux, ils ne penseraient jamais.

Lui aussi ? Jude essuya d'un revers de manche ses larmes qui ne cessaient de couler et laissa retomber son bras le long de son corps. April l'attrappa à la fois avec douceur et fermeté. Le garçon ne broncha pas. Il aurait pu l'envoyer balader, l'insulter... mais il se sentait complétement vide et exténué alors il ne fit rien, à pars l'écouter.

-... Il n'y qu'en apprennant à regarder devant et à vivre malgré sa présence que tu t'en sortiras. C'est ce qui fera ta faiblesse, oui, mais ta force de caractère aussi.

Regarder devant ? Ouais... plus facile à dire qu'à faire ! Il ne savait même pas pars où c'était "devant".
Mais c'étaient des paroles qui réchauffaient le coeur...
La main frêle de la jeune fille lui attrappa le menton pour lui relever la tête. Il se laissa faire, surpris. Son regard était sincère, ça lui fit un peu mal au coeur.

- On a tous le droit à une seconde chance.

Mais...
Jude l'observa un instant. Elle était bizarre comme fille... Elle n'ont plus n'avait pas vécu une vie bien rose on dirait... Mais poutant bien différente de la sienne malgré tout.
Le garçon se dégagea doucement le tête et essuya une fois de plus ses larmes, bien décidé à ce qu'elles ne recoulent pas. Tête baissée, il observait le côté pour ne pas rencontrer le regard de la fille.

- C'est idiot.

Ca serait trop beau, c'est surtout ça...
Au fond... Il se doutait qu'elle n'avait pas vraiment tord... Mais l'admettre était une autre paire de manches.
Même si les larmes s'étaient taries, son corps restait encore agité de soubresauts qu'il avait du mal à calmer. Ca l'énervait. C'était la deuxième fois qu'elle le voyait dans un état de faiblesse... Elle devait le prendre pour un gamin et ça il ne le voulait pas. Le sort s'était bien acharné sur lui aujourd'hui...
Oui... deux fois, mais elle revenait encore lui tendre la main, malgré tout ce qu'il avait pu dire.

- Pourquoi tu fais tout ça ?

*Je le mérite pas, moi qui détruis toujours tout.*

Aujourd'ui encore, il avait brisé son père en morceau alors qu'il tentait de se reconstruire. Est-ce qu'il méritait qu'on l'aide ? Non, certainement pas.

- C'est idiot.

Un léger sourire gagna les lèvres de la jeune fille.
Y avait-il une seule chose dans ce monde qui ne soit pas idiote ? L'existence même, au fond, était idiote.
Arriver, naître, pour repartir un jour, c'est un peu bête, non ?

- Pourquoi tu fais tout ça ?

*Je le mérite pas, moi qui détruis toujours tout.*

Elle se leva, face à lui.

- Parce que mes bras sont trop courts pour coller une droite à mon créateur. - Alors autant m'en servir pour relever des abrutis !
rit-elle en lui tendant la main pour qu'il s'accroche et se dresse à son tour sur ses jambes.

(N'appie, je t'envoie un MP c'est important !! :O
Faut absolument que tu le lises avant de répondre !)


Le garçon gribouilla une sorte de sourire sur ses lèvres... Mais qu'elle arrête donc de le traiter d'abrutis !
Elle lui tendit la main. Jude l'observa comme si c'était la première fois qu'il la voyait.
Encore ?
Mais cette fois, il l'attrappa sans détour et se releva.
C'était si... inhabituel...

Soudain, quelque chose de froid tomba du ciel et vint se poser avec délicatesse sur la main de la jeune fille qu'il tenait. L'adolescent leva les yeux au ciel.
Des centaines... des milliers de flocons y tourbillonnaient doucement, descendant vers eux.
C'était beau.
Jude sentit son coeur se crisper de mélancolie. Toute cette neige...

- April... A ton avis, que devient la neige... quand elle fond ? demanda-t-il d'une voix lointaine en fixant le ciel.

- April... A ton avis, que devient la neige... quand elle fond ?

April haussa les sourcils, un peu désorientée par la question. Elle se demanda ce que Kyle aurait répondu.
Sûrement le truc le plus optimiste qui soit.

Elle sourit.

- Ben, les purs scientistes te diront "de l'eau", mais personnellement je pencherais bien pour le début du printemps...Pourquoi ?

- Ben, les purs scientistes te diront "de l'eau"...

Oui... Evidemment, comme tout le monde en fait. Pourquoi répondre autre chose ? Ca coulait de source !

- Mais personnellement je pencherais bien pour le début du printemps...

Jude écarquilla les yeux de surprise et se figea.

*Comment est-ce que...?*

- Pourquoi ?

Le garçon lâcha la main qu'il tenait toujours.
Jamais il n'aurait cru pouvoir entendre cette réponse une nouvelle fois.
Il se sentait complétement vidé, calme. Apaisé. Bien sûr, ça ne durerait pas mais...

- Merci.

Il tourna la tête vers April. Un mince sourire était apparu sur ses lèvres. Infime mais bien là. Au fond de ses yeux brillaient de la reconnaissance.

*Merci pour tout ce que tu fais.*

La main du garçon lâcha la sienne. April leva les yeux vers les siens, étonnée.

- Merci.

Il souriait. Très peu. Et à sa façon. Mais elle sentait, sans trop savoir comment, que quelque chose l'avait touché dans ses mots.

Elle lui rendit son sourire.

- C'est ma saison préférée... En même temps, comment-veux tu ! Avec un nom pareil !

Elle rit à nouveau.

Puis son regard vert se perdit dans la contemplation des flocons qui poudraient du ciel en fines paillettes immaculées.

- Mais...tu sais...la neige aussi a son charme, au fond...

C'était en réalité une image , oui, cette idée de neige et de printemps.

Elle voyait ça ainsi en tout cas. Elle était le printemps, enfin, elle y appartenait. Après l'ère glaciaire, le gel au coeur et la pluie incessante de larmes, où Jude semblait encore se tenir, sa vie avait repris des tons. Encore doux et pastels, comme les jolies touches colorées et fleuries sur les arbres en mars...ou en Avril...

(nice ce message ^^)


Le garçon haussa des épaules. La neige c'était froid et inutile, juste bon à faire crever les pauvres. Ca foutait la merde dans la vie des gens, les gène et c'était tout. Rien de bon dans cette neige à part l'apparence. Ca parait doux... et ça te glace et te brûle.

Lui, il n'avait pas de saison préférée. Il s'adaptait, c'est tout. L'été, le soleil apporte sa chaleur et c'est agréable. Il n'y a pas à craindre le froid même la nuit... Mais c'est aussi à cette période qu'il y a le plus de monde, pleins de touristes entre autre... C'est plein de vie.
L'automne c'est un drôle de mélange entre les couleurs chaudes de l'été avec ses quelques rayons de soleil mais aussi l'hiver avec ce froid et la mort... Oui, c'était une drôle d'agonie en fait...
L'hiver, ça ce n'était pas trop son truc. Il fait froid et tout est mort et silencieux. D'un autre côté, les rues sont alors vides et c'est plus calme. Mortellement calme...
Puis le printemps... C'est assez étrange car comme l'automne c'est entre l'hiver et l'été et pourtant... Il n'arrivait pas à mettre de mots dessus mais ça restait un peu comme de l'espoir car toujours après la neige, le printemps revenait, inlassablement. C'était trop poétique, une saison où les gens se sentent plus.

Hééé ! Mais qu'est ce qui lui prennait là ? C'était grotesque comme pensées. Fallait qu'il se remette un peu de plomb dans la tête, cette fille lui transformait la cervelle en gelée.
Jude poussa une sorte de grognement avant de lancer, regardant le sol :

- Bon... On reste ici jusqu'à se transformer en glaçon ou on bouge ?

April haussa un sourcil, l'air railleur :

- Et moi qui te voyait déjà dans mon mojito ! Bon amène-toi..!

Elle secoua un peu sa veste, frotta son jean pour en enlever la poudre blanche glacée et s'avança en direction de la maison O'Brien.

Passer par l'entrée et traverser le salon devant un Jake furieux avec son fils tant aimé n'était pas la meilleure des idées. Aussi, elle choisit de contourner la terrasse de bois surelevée pour gagner la droite du bâtiment.
La facade en crépit s'ornait joliment de quelques faux rosiers -Lisa aimait toujours les artifices.
Faux rosiers bien pratique en définitive...

Forte de ses 5 ans d'expérience en escalade, April s'accrocha à la structure de plastique fleurie, cala ses tennis sur les suspensions solides - Lisa aimait aussi que ses artifices tiennent bien - et commença à escalader les murs pour monter à sa fenêtre.

Une fois grimpée en haut, elle plaqua ses mains sous une vitre de sa chambre pour la soulever et l'ouvrir.

Elle se hissa à l'intérieur et ouvrit davantage encore pour que Jude puisse rentrer à son tour. Il semblait débrouillard comme type, elle savait qu'il n'aurait pas trop de souci à monter.

Alors, histoire de manger quand même, elle fila vers le rez de chaussé, dans le salon, ignorant superbement Jake et sa mère qui discutaient un peu trop collés-serrés à son goût, attrapa un grand plat en forme de disque argenté, le remplit d'à peu près tout ce qu'il y avait sur le buffet, attrapa leurs cocktails et s'apprêta à remonter quand elle vit Aladiah qui se tenait seule devant son assiette sur un fauteuil.

Cette gamine était tellement sage qu'on ne la remarquait quasiment pas. Une chance quand on pensait à ces gosses braillards et capricieux que certains se coltinaient.

- Hé, dis, Alad' ! Reste pas seule, viens au moins là haut avec nous !

Elle poussa du pied du pied ceux de la gamine avec affection et taquinerie pour qu'elle se lève et la fit monter devant elle.

Ils arrivèrent à l'étage d'April. Une exception parce que bien souvent seule April y mettait les pieds. Parents strictement prohibés et petite soeur encore pire.
Mais, contrairement à ce que l'on pouvait croire, pas tant pour des raisons d'indépendance ou de lubies adolescentes que pour cause de griffes rouges, d'oreilles pointues, de voix traînante et profonde et de franglais compulsif...

Si elle "recevait", elle voulait au moins que ça reste confiné entre ses murs. Sinon bonjour la pagaille familliale.

Elle dirigea la petite et son assiette qu'elle tenait toujours vers la salle T.V, en face de sa chambre.

- Bon, une fois n'est pas coutume, tu peux regarder un DVD ici. Je te fais confiance pour le choix du film. De toute façon si tu regardes des trucs pas de ton âge, c'est toi qui en bavera au final...Je te laisse tranquille, Jude et moi on va discuter et bon, les conversations d'adultes c'est pas ce qu'il y a de plus intéressant pour une petite fille de ton âge...Bon si tu as un souci, je suis dans la chambre avec lui. ( HJ : Le premier qui ose une pensée perverse, je le scalpe >.< ).

Sur ce, elle ferma la porte. Elle regagna sa chambre ou elle étendit un vieux drap sur son lit pour y poser le plateau.

- Enfin à manger, je crève la dalle !

Elle s'assit en tailleur sur le grand lit king size et attrapa une spécialité asiatique qu'elle enfourna sans plus tarder, morte de faim.

- Bon allez, l'abruti, raconte-moi tout de ta misérable vie ! le charia-t-elle.

Elle n'avait pas remarqué la porte de sa chambre laissée contre qui laissait passer dans le couloir tout ce qu'elle racontait ...et menait ça à deux oreilles de neuf ans sagement posées un peu plus loin...

- D'accord... si toi aussi tu me parles de la tienne ensuite. Mais j'te préviens, y'a pas grand chose pour t'interesser...

Bah... t'as bien vu avec Jake c'est pas la folle entente... J'ai pas grand chose à dire là dessus parce que je sais pas trop quoi penser à ce sujet. Après la mort de ma... mère... on s'est pas mal engueulé, plus que d'habitude. Je lui ai dit des trucs franchement pas cool et lui non plus ne l'a pas été. De ce côté là, on est un peu quitte. J'habite chez mes grands parents (maternels) dans une ptite ville paumée à une centaine de kilomètres de Chicago. Y'a rien à faire là bas... alors de temps en temps je viens ici. Sinon... voilà quoi. Si t'as des questions vas-y parce que je vois pas quoi te dire.

Et toi alors ?

April hocha la tête. Et ça, c'était pas grand chose pour lui ?

- Ben mon père était patron de Mundio Mio, je sais pas si t'en as entendu parler...Bref, le genre gros poisson plein au as et rien à foutre de ta gueule. Ma mère est pas la créature la plus fûtée qu'il soit mais au point de l'épouser...jamais compris pourquoi. J'ai vécu dans cette maison en solitaire dès mes 12 ans et m'en suiw accomodée, on dira. Bref, père mort dans un incendie, mère remariée à Jake qui cherchait à adopter un enfant pour une situation stable et donc voilà, Aladiah. Et on vit comme ça depuis quelque mois.

Elle se tassa un peu dans la couette moelleuse sous elle, s'étira et s'allongea sur le ventre en travers, pieds croisés en l'air derrière elle pour attaquer sans pitié les fourrés au soja.

- Ah oui: et suis à la fac, en langues. T'es à quel lycée ?

Jude resta un instant silencieux. Quelque chose lui restait en travers de la gorge : la gamine. Evidemment, il aurait dû s'en douter... ellle ne ressemblait ni à April ni à sa mère et il n'avait pas de soeur -normalement-. Adoptée... Il avait voulu se reconstruire une vie, sans lui. En même temps ils n'étaient pas très proches, au contraire... Mais quand même !
Une gamine...
Dans un sens, le fait que ça ne soit pas un garçon le ménaeait un peu, il ne l'avait pas "remplacé"... Mais est-ce qu'une fille c'était mieux ? Peut-être que Jake jugeait qu'il avait un fils tellement catastrophique que c'était sa plus grosse erreur... Donc ça menait à prendre une fille.

Il n'avait définitivement plus fin. La boulette de riz lui restait coincée dans le gosier.

- Ah oui: et suis à la fac, en langues. T'es à quel lycée ?

Jude grommela silencieusement.

- J'étais pensionnaire au lycée Kennedy, à Chicago... Mais j'me suis fais renvoyer y'a trois mois.

Pour avoir sêché une semaine complète de cours... et peut-être aussi pour avoir insulté et menacé des profs... et peut-être aussi des élèves finalement... plus une ou deux petites bagarres sans grande importance...
Une sorte de grattement puis un claquement sec se fit entendre. Cela provenait de dehors, prêt de la fenêtre. Jude tourna la tête, fronça des sourcils... Mais il n'y avait rien.
De toute façon... qui serait assez taré pour escalader jusqu'au troisième étage alors qu'il y a quelqu'un ?

- J'étais pensionnaire au lycée Kennedy, à Chicago... Mais j'me suis fais renvoyer y'a trois mois.

Les yeux verts se perdirent un peu dans le vide.
Kennedy..kennedy pourquoi ça lui disait quelque chose ?

Kennedy...AH ! Oui ! Le lycée de Kyle !!!

Elle bondit presque.

- Tu connaissais Kyle Deltignant ? Il y était aussi et il a disparu sans laisser de traces...!

Pas au bout de ses sursauts, elle entendit un bruit soudain contre la façade à l'extérieur.

Aux aguets, elle dressa la tête et, le regard coulant vers les grandes fenêtres, elle tendit l'oreille, sur le qui-vive.

Dans sa poitrine, son coeur s'emballa, paniqué...

Jude se laissa basculer en arrière, sur le matelas. Il fixa le plafond pensivement. Kyle Deltignant ? Non, ça ne lui disait rien. En même temps il n'était restait que quelques mois à ce lycée et si c'était un ami d'April il devait être plus grand que lui... Bref, à part si c'était un mec sur qui il avait tapé il ne voyait pas. En tout cas le fait qu'il ai disparu de ce bahut faisait qu'il était un mec censé. C'était un trou à rat, pas un lycée.

- Connait pas.

Le garçon tourna la tête vers la rousse qui fixait la fenêtre comme un lapin aux aguets. Jude haussa un sourcil moqueur.

- Imbécile ! T'as peur du vent ?

Il soupira et haussa nonchalemment des épaules.

- Attends... qui voudrais-tu qui vienne jusque là ?!

- Connait pas.

Elle n'écouta que d'une oreille la réponse de Jude. Son estomac se nouait. Et si c'était encore un de ces dingues, Zephiro, Nate, Azrael, Ressia...Ca pouvait être n'importe qui.

La voix narquoise du garçon la ramena un peu à la réalité, enfin à l'instant présent parce que malheureusement on ne pouvait dissocier ces tarés de la réalité...

- Imbécile ! T'as peur du vent ?

Le regard d'April se tourna vers lui. Il semblait bien sûr de lui ce Jude. En même temps...c'était vrai qu'elle pouvait paraître un peu bête.

- Attends... qui voudrais-tu qui vienne jusque là ?!

*Personne justement...*

Elle soupira. Et se leva vers la fenêtre. Histoire de vérifier et d'être certaine.

Au bout de quelques secondes, elle revint s'affaler sur le matelas et attrapa une poignée de chips au crevettes.

- Laisse-tomber, microbe. fit-elle avant de les fourrer dans sa bouche.

Elle s'allongea sur le dos, bras au dessus de sa tête, mains jointes sous sa nuque, en observant le plafond.

Marrant quand on y repensait combien cette nouvelle attitude qu'elle avait adoptée là lui faisaient penser à Kyle. Peut être qu'au fond, comme ça, il survivait un peu en elle...Du moins, elle l'espérait profondément.
On se raccroche à ce qu'on peut.

- Dommage pour Kennedy. Avec ta belle gueule de bad guy, les filles doivent encore en pleurer...! le taquina-t-elle , le sourcil railleur, regard vert dirigé sur lui, tête rehaussée par son poignet calé sur le flanc sous son crâne.
A moins que l'abruti ne soit déjà casé...?

Jude ne chercha pas plus loin la cause de l'inquiètude de la rouquine. En fait il n'en avait rien à foutre. Alors laisser tomber ne lui posait aucun problème !
La fille s'allongea à son tour.

- Dommage pour Kennedy. Avec ta belle gueule de bad guy, les filles doivent encore en pleurer...!

Hum... Oeil pour oeil, dent pour dent comme on dit. Chacun son tour. Jude soupira d'exaspération. Il n'en avait rien à foutre (une fois de plus ^^) de ces nanas. Il y avait suffisamment d'imbéciles sur terre pour toutes les caser.

- A moins que l'abruti ne soit déjà casé...?

Elle devait lire dans ses pensées... Il fixa de nouveau le plafond.

- Ouais, on peut dire ça comme ça.

Disons que c'était la version officielle et qu'en effet, il était avec quelqu'un depuis trois ans maintenant... Mais il ne considérait pas vraiment Stacy comme ça petite amie.
Un sourire narquois se dessina sur ses lèvres.

- Mais c'est p'tet pas le cas de tout le monde... En tout cas, elle est plus belle que toi, railla-t-il.

Le but n'était pas méchant, mais c'était provocation pour provocation.

- Ouais, on peut dire ça comme ça.

Le sourire goguenard de la jeune O'Brien s'élargit.

- Quoi, tu la payes...?! ricana-t-elle.

- Mais c'est p'tet pas le cas de tout le monde... En tout cas, elle est plus belle que toi.

Les sourcils de la rousse s'arquèrent, plutôt surpris de l'audace de l'interlocuteur. Ca ne la vexait pas vraiment, elle savait qu'elle n'était pas une de ces créatures de rêves extatiques. Mais bon... être April O'Brien n'était pas mal non plus...!

Et April n'était pas April pour rien. Se laisser démonter n'était pas franchement son genre...

Elle se redressa et s'avança un peu vers lui en glissant sur ses genoux. Elle s'arrêta devant lui, à quelques centimètres de son visage, dos cambré, hanches inclinées, décolleté plutôt suggéré, en appui sur ses bras tendus, mains posées sur la housse de couette moelleuse.

- Tu crois ? souffla-t-elle d'une voix suave, le regard charmeur, en avançant les lèvres vers lui avec un petit sourire en coin, ses mains glissant sur ses épaules masculines avant de, soudain, les attraper fermement et de le pousser du lit pour qu'il bascule par terre alors qu'elle s'écroulait sur le matelas, se tenant le ventre, morte de rire.

Bruit de frottement de tissu. Jude tourna la tête pour voir la rouquine s'avancer vers lui avec des airs félins. Il haussa légèrement un sourcil, un peu surpris, et détailla la fine silhouette.
April s'arrêta toute proche de lui. Il la fixa sans broncher mais se demandant tout de même ce qu'elle comptait faire là...

- Tu crois ? fit-elle d'une voix sensuelle.

Jude fronça les sourcils alors qu'elle lui caressait les épaules. C'était louche ça. Poufiasse va !
Et il ne croyait pas si bien dire... La rousse lui attrappa les épaules et le repoussa violemment en arrière. Le garçon bascula du lit et tomba sur le dos.
Ouille... pas le dos !
La douleur lui laissa échapper un juron.

- Putain !

Il se redressa furieux, alors qu'O'Brien se tordait de rire sur son lit. Il la fusilla du regard, le poing serré. Ca n'aurait pas été une fille, il l'aurait démoli. Lui, il ne trouvait pas ça drôle du tout !

Il sortit de la chambre en claquant rageusement le porte derrière lui.
Une fois dans le couloir, il se dirigea vers le fond de celui-ci. Il donnait sur une fenêtre. Jude regarda la neige tomber, les bras croisés et les joues rougies par la colère.
Foutue journée !

- Putain !

Le rire d'April s'évanouit bien vite quand elle comprit que dans son élan impulsif - qui a dit "comme d'habitude" ? - elle avait complètement oublié le fait qu'il était blessé.

Hébétée, elle regarda partir avec colère dans le couloir.

Purée, parfois, elle savait être vraiment conne !

Elle s'en voulait de si peu réfléchir. Enfin...le mal était fait...

Se mordant la lèvre, elle se leva et se glissa à son tour dans le corridor. Il ne s'était pas enfui. Elle s'en sentit soulagé. Elle ne voulait pas le faire fuir.
Au fond, elle l'aimait bien. Mais il n'était pas le genre de caractère dont elle avait l'habitude. Dur à appréhender donc.

Enfin, elle ne s'était pas regardée...!

Rouge de confusion, elle s'avança doucement dans sa direction et fit d'un ton penaud :

- Hum...désolée...J'avais zappé pour ton dos...Je...

Elle se frotta le front avec sa paume, un peu perdue.

- S'il y a quoique ce soit que je puisse faire pour me faire pardonner...

Jude fusillait les flocons du regard, faute de voir autre chose... Jusqu'à ce que miss O'Brien s'approche. Il le vit arriver dans le reflet de la vitre mais ne se retourna pas.

- Hum...désolée...J'avais zappé pour ton dos...Je..., fit-elle d'une petite voix.

Visiblement elle cherchait à s'excuser. Jude grommela et ne bougea pas d'un pouce.

- S'il y a quoique ce soit que je puisse faire pour me faire pardonner...

Madame voulait bien se montrer charitable ? Quelle grandeur d'âme ! Néanmoins l'offre pouvait se révéler interessante... mais aucune idée ne venait à l'esprit du garçon.
Puis soudain, sortant de la brume, il remarqua qu'il était tard, qu'il faisait froid et qu'il était fatigué et qu'il n'avait pas trouvé d'endroit où dormir cette nuit par dessus le marché !

Il soupira. Ce n'était pas son genre de demander quelque chose parce qu'il n'aimait pas qu'on le prenne pour un faible mais là... et c'était elle qui avait proposé !

- Un peu de fric et l'adresse d'un hotel pas cher.

Il n'avait vraiment pas envie de passer la nuit dehors au risque de vraiment déprimer cette fois. Et puis Stacy ne serait sûrement pas chez elle, elle ne savait pas qu'il était à Chicago. Au pire il se trouverait bien un coin dans une bouche de métro si elle se montrait radine, il garderait l'argent pour manger.

Non, Jude n'arrivait même pas à imaginer une seule seconde qu'elle puisse l'héberger. Cette idée ne lui traversa même pas l'esprit. Il y avait Jake, c'était donc catégoriquement impossible.

- Un peu de fric et l'adresse d'un hotel pas cher.

Elle eut un petit rire qui effaça un peu de sa gêne.

- Ben, toi au moins, tu perds pas le nord !

En secouant la tête, elle l'attrappa par le bras - délicatement cette fois, au niveau du poignet - et l'entraîna dans sa chambre.

Là, elle fouilla dans son sac et en sortit une de ses nombreuses carte gold qu'elle lui tendit. Il y avait assez sur ce compte là pour l'héberger trois mois au Château Marmont. Mais quand on connaissait la fortune des O'Brien, ce petit capital-ci ne représentait pas grand chose...

- Tiens. Et un conseil, choisi un bon hotel. Les sommiers de motels te bousillent le dos.

On aurait dit qu'elle lui filait 5 dollars seulement. En réalité, habituée au faste, elle ne savait pas trop ce que représentait cette somme vue de l'extérieur.

Elle retourna s'asseoir en tailleur sur son lit.

- Je sais que c'est pas forcément la meilleure idée avec Jake et Aladiah et tout...Et je doute que tu acceptes, mais bon au moins j'aurais proposé :
sinon, tu peux aussi rester dormir là. Le canapé de mon salon T.V fait aussi lit double. Et personne ne monte ici sans que je l'y ai autorisé. Au pire pour le ptit dèj, on t'apportera un plateau...Enfin à toi de voir, quoi.

Jude ne broncha pas quand elle se mit à rire et se laissa faire quand elle l'emmena dans sa chambre. La rouquine sortit une carte qu'elle lui tendit. Le garçon la saisit et l'examina. Il avait demandé de l'argent... pas une carte !

- Tiens. Et un conseil, choisi un bon hotel. Les sommiers de motels te bousillent le dos.

Evidemment... quand on est habituée à dormir sur des lits de princesse. Chochotte.
Il garda sa remarque pour lui.

Quand à la deuxième proposition d'April, il secoua vivement la tête. Pas question. Il n'allait pas non plus multiplier les dettes !

Ses sourcils se froncèrent alors qu'il observait la carte.

- T'as envie que je finisse ma nuit au commissariat ou quoi ?

Il lui jeta la carte, amer.

- Tu me vois me ramener avec un truc comme ça ? On va me prendre pour un voleur. J'ai pas envie de croiser les flics.

Sinon il allait encore passer un sale quart d'heure.
Jude repensa à sa proposition. Rester ici. Dans un sens, c'était tout ce dont il pouvait rêver actuellement. Pas besoin de sortir pour trouver où dormir, un lit, du confort et de la nourriture.
Oui, mais il y avait Jake, d'une part, et aussi il ne voulait pas avoir de comptes à rendre à la rouquine.
Elle pouvait pas tout simplement lui filer 20 dollars ? Il partait et on en reparlerait plus. Elle allait bien vite l'oublier de toute façon.

- T'as envie que je finisse ma nuit au commissariat ou quoi ?

Tu me vois me ramener avec un truc comme ça ? On va me prendre pour un voleur. J'ai pas envie de croiser les flics.

Effectivement, c'était bien propable quand on y réfléchissait. Vu sa dégaine aussi...

April récupéra la carte, silencieuse et la rangea.

Il n'avait franchement pas tort. Mais à un moment, vivre avec tant d'argent la détachait un peu de la vie normale...

Bon, elle n'allait pas se laisser abattre pour une pareille bêtise. Et elle n'avait pas d'espèces. Elle payait toujours en carte bancaire. C'était tellement facile. Un clic et quelques chiffres et le monde vous appartenait.

Injuste aussi.

Elle repensa un instant aux Deltignants, et ses yeux tombèrent sur le vieux jean usé jusqu'à la corde de Jude.

Franchement injuste.

Et dire qu'elle osait encore se plaindre qu'elle s'ennuyait. Alors que quelque part, une fille ou un type de son âge trimait comme un diable pour se payer sa croûte.

Saloperie de fric. Le nerf de la guerre, le premier des vices. Et pourtant aussi vital que le sang dans vos veines...

Elle grimaça.

- Désolée, aucun liquide et je ne te laisserais pas retourner à la rue. Tu dors ici. décréta-t-elle d'un ton sans appel.

- T'auras qu'à l'éviter...fit-elle en parlant de Jake.

- Et je viendrais pas t'emmerder non plus.

Elle soupira.

- Enfin - je sais que c'est facile de dire ça pour moi -mais...tu te rends bien compte que tu pourras pas l'éviter indéfiniment...Faudra bien que tu finisses par lui reparler un jour...Je t'aiderai si tu veux. J'ai donné question "père indigne". Et, crois moi, Jake à côté de Ray, c'est le Père Noël...

Elle croisa les bras et alla s'appuyer épaule contre un mur, bras croisés.

- Je ne connais pas toute l'histoire, loin de là, mais pour ce que j'en ai vu, je crois que vous méritez tous les deux cette "seconde chance".

Un long silence suivit les remarques de Jude. La rouquine semblait embarassée. Mais ça ne dura pas. Elle reprit rapidement du poil de la bête.

- Désolée, aucun liquide et je ne te laisserais pas retourner à la rue. Tu dors ici.

Le garçon fronça des sourcils. Il ne venait pas de lui faire comprendre que c'était non ? C'était peut-être dur à comprendre...
Elle justifia que personne ne viendrait l'embêter mais est ce que c'était suffisant ?

Puis vinrent les remarques habituelles et inévitables à propos de Jake. Le garçon soupira.

- Je sais...

Oui, il savait qu'ils devraient bien un jour se reparler et que ce moment était très proche.
Mais l'histoire du Père Noel, il n'y croyait pas.

- Pff... Le Père Noël n'existe pas alors comment veux-tu que jte crois ?

Malgré le ton grincheux, la remarque n'était pas aggressive, preuve qu'il n'était plus trop faché. D'ailleur, il n'avait pas hurlé non plus quand elle avait ordonnée qu'il resterait ici. En soit, cela voulait dire qu'il acceptait.

- Je sais...

Pff... Le Père Noël n'existe pas alors comment veux-tu que jte crois ?

April esquissa un sourire. Il n'avait pas dit non pour rester.

S'assagissait-il...?

Exister ? Le père Noël ? ...Mmmh avec tout ce qu'on voyait depuis le début de l'année, ça ne l'aurait pas forcément étonnée !

Enfin disons dans sa version machiavélique, long cheveux rouges et sourire ravageur, oeil rubis et qui "offrirait "des anneaux mystérieux et passerait par les fenêtres plutôt que par la cheminée...Enfin " passer par " n'était pas vraiment le verbe adéquat...

Elle lui posa la main sur l'épaule. Doucement cette fois, histoire de lui montrer qu'elle était encore désolée.

- J'ai loué Massacre à la Tronçonneuse. Je l'ai jamais vu et je pensais me le regarder ce soir, ça te dis ?


( HJ : Eh non, j'ai pas pu résister... Juste pour le plaisir des yeux XD :

Spoiler:

...* se barre en courant avant de finir en compote * )

La rouquine souria avant de lui poser la main sur l'épaule.
Non, il n'irait pas lui parler maintenant, pas question !

- J'ai loué Massacre à la Tronçonneuse. Je l'ai jamais vu et je pensais me le regarder ce soir, ça te dis ?

Ah... c'était juste ça...
Jude haussa des épaules.

- C'est nul comme film ! T'as pas plutôt... un truc genre le 5ème Elément ? Ou L'Effet Papillon, Seven... Enfin un truc un peu mieux quoi !

Plus psychologique aussi... Mais c'était un mot qu'il n'aimait pas.

- Massacre à la tronçonneuse... C'est un film de fillette en manque d'émotions fortes ça ! grommela-t-il.